Carrare, atelier de sculpture à Torano, été 1971
Il marchait pieds nus entre les blocs de marbre blancs déposés devant l’atelier de sculpture, comme s’il suivait un jeu de piste imaginaire. Il montait sur un bloc, ou bien se tenait en équilibre sur les débris amoncelés dans la cour où pataugeaient dans les flaques de la dernière pluie les canards indifférents.
Il était le fils d’une sculptrice américaine qui venait chaque année travailler là, comme d’autres artistes venant du monde. On entendait raisonner le bruit sec des outils des sculpteurs passeurs d’images, messagers des émotions pérennes sculptées dans le marbre de la montagne.
Lui, continuait sa promenade tout nu, avec pour tout vêtement sur le dos, sa grâce naturelle d’enfant libre, d’enfant presque sauvage, quant la nudité nous ramène à la connaissance du monde, à la connaissance primaire de soi.
Et voilà qu’il mangeait goulument une grappe de raisin, tenant la grappe dorée aux grains succulents contre sa poitrine, dans sa main droite puis dans sa main gauche, écrasant contre sa bouche le jus de la treille en savourant le divin breuvage, nectar des dieux.
Comment résister à la tentation d’une prise de jus ?