Le promeneur qui emprunte la via dell’Abbondanza pour la première fois, découvre après quelques pas la fontaine la plus connue de Pompéi. C’est sur ce chemin, celui des promeneurs de ruines, que j’ai choisi de marcher pour aller à la rencontre des quarante-deux fontaines de Pompéi.
Après quelques photographies d’ensemble et avec “l’imprécision inévitable qui provient de la hâte”, un point de vue systématique de situation du paysage de chaque fontaine avec si possible la silhouette du Vésuve s’est imposée. “Etudier le paysage aussi bien que le monument”.
Les figures érodées, sculptées en bas relief sur un cippe placé à l’arrière de la fontaine, regardent presque toutes vers la rue et malgré l’érosion qui depuis deux mille ans avance inexorablement dans son oeuvre de destruction, on peut encore se placer en face de leur regard et reconnaître le renard, le loup, le lion, le silène, les cercles concentriques qui ressemblent à des ondes, Mercure, et les autres figures mythologiques.
Une prise de vie, plein cadre et à hauteur du visage, de l’animal ou de l’emblème héraldique, la désigne et la personnifie. Seules traces des habitants de Pompéi, on se plaît à imaginer que peut-être ces portraits nous racontent une histoire et nous entraînent dans un face-à-face émouvant.
Sur le rebord de la vasque une simple courbe aux formes douces.
Combien de fois a-t-il fallu poser la main sur le rebord de la fontaine pour que la résistance de la pierre du Vésuve faiblisse sous la pression de la paume et que celle-ci laisse son empreinte ? Avec la trace d’un geste quotidien et le portrait sculpté, fruit d’une pensée volontaire, la fontaine est une personne.
————
1996 Fontaines – 40 photographies, 6 dessins